Profitant d’une fin d’hiver tant attendue, les Ailes du désir étaient à Londres début mars, pour goûter l’ambiance éclectique et l’effervescence londoniennes. Un programme chargé : Tate Modern, Tate Britain, Royal Academy, Saatchi Gallery, un rendez-vous dans l’atelier d’une jeune artiste Lili Phelouzat… et peu de temps pour flâner, mais toutes ces expositions en valaient la peine.
La Tate Modern présentait une rétrospective de Yayoï Kusama, l’artiste japonaise connue pour ses environnements de pois colorés, encore plus importante que celle du Centre Pompidou à l’automne dernier : l’occasion de mesurer la diversité du parcours de l’artiste, tour à tour peintre, sculpteure, performeuse, écrivaine, chanteuse, dans la fièvre de New-York pendant les années 60, puis choisissant depuis son retour à Tokyo en 1973, après une période douloureuse, de vivre en hopital psychiatrique tout en composant des environnements imposants, et enfin récemment en entreprenant des séries de peintures carrées posées à l’horizontale autour du thème de la mort.
Ce qui nous a frappés surtout, c’est la ténacité, la persévérance de l’artiste dans sa quête d’une autonomie à la fois physique, sexuelle et intellectuelle et dans la production d’une œuvre radicale par l’accumulation ou la répétition.
Autre rétrospective présentée à la Tate Modern, celle de l’italien Alighiero Boetti : un parcours historique qui débute avec l’Arte povera aux côtés de Pistoletto, Merz, Kounellis, Penone, Zorio ou Anselmo, une œuvre qui s’inscrit dans une démarche collective impliquant souvent d’autres personnes, comme ces travaux de mail-art, ces tapisseries réalisées avec le concours de femmes afghanes réfugiées au Pakistan représentant des mots ou des cartes du monde, ou encore ses participations à des spectacles de théâtre dont il réalise costumes et décors.
La Tate Britain présentait une exposition "Picasso et l’art moderne britannique" : elle permettait de voir des œuvres majeures de l’artiste espagnol et de mesurer son influence sur des artistes britanniques, certains très célèbres comme David Hockney, Henry Moore, Francis Bacon, d’autres que nous avons découverts comme Graham Sutherland, Ben Nicholson, Windham Lewis, Duncan Grant.
Nous avons retrouvé David Hockney à la Royal Academy avec la présentation de 50 ans de travaux autour du paysage, en particulier des œuvres récentes voire créées pour l’occasion (dessins Ipad, films…) ; cette exposition a été un vrai choc pour la plupart d’entre nous, en raison bien sûr des dimensions de la plupart des œuvres, mais aussi de l’élaboration de ces images renouvelant la perception du spectateur, traitement de la couleur, de la perspective, transcription de l’espace…
Autre découverte d’un artiste britannique majeur, celle de Richard Wilson à la Saatchi Gallery ; l’artiste a installé au sous-sol "20 :50", un bassin d’huile de vidange utilisé en miroir pour refléter l’architecture de la salle, espace virtuel jouant sur l’illusion d’optique avec le spectateur.
La galerie montre aussi une exposition consacrée à la scène artistique allemande actuelle qui nous a été présentée par une jeune médiatrice du service éducation, les pièces des artistes allemands nécessitant une attention particulière aux nombreux détails constitutifs de l’œuvre ; à noter les efforts faits pour le développement de l’éducation artistique tant dans les institutions que dans une galerie privée comme Saatchi, au point que la galerie montre quelques travaux d’enfants dans des conditions analogues à celles réservées aux artistes.
Nous avons continué dans la couleur en visitant l’atelier de Lili Phelouzat, une jeune artiste française installée à Londres depuis une dizaine d’années ; à côté de sa pratique personnelle (des toiles très colorées), Lili organise aussi, en collaboration avec Lucia Barbano, elle-même espagnole, des évènements artistiques comme "Project 2012", une série d’expositions réunissant de jeunes artistes autour du thème de la prédiction de fin du monde au 21/12/2012. Si la vie d’artiste n’est pas très facile à Londres, elle implique une dimension collective qui provoque rencontres et échanges : Lili partage son atelier avec d’autres artistes ; et s’il est situé dans un quartier plus populaire que ceux que nous avons fréquentés en début de séjour, il témoigne par son atmosphère diverse et colorée de l’énergie et de la créativité de ces jeunes artistes .
Ensuite chacun a utilisé son temps disponible en fonction de ses affinités : visite des expositions Gilbert & George à Whitecube Gallery, Mondrian/Ben Nicholson à la Galerie Courtaud (qui dispose surtout d’une collection permanente exceptionnelle), balade de "street art"
dans les quartiers en voie de réhabilitation (et il y en a beaucoup à Londres !), promenade dans le quartier des docks devenu avec le millenium un site d'expérimentations architecturales, retour aux fondamentaux au British Museum et à la National Gallery, approche de la vie culturelle londonienne avec une des nombreuses comédies musicales (une spécialité britannique), un opéra contemporain ou un exceptionnel concert de jazz de Roscoe Mitchell.
Sans oublier une autre spécialité londonienne, le shopping (et la mode) à Primark, Uniqro ou Selfridges, pendant que d'autres partaient à la recherche du "vintage" dans le quartier de Camden célèbre pour son marché aux puces…
Et avant le retour dimanche, juste le temps de s’aérer avec le soleil en faisant une promenade à Hyde Park autour de l’anneau-fontaine créée par Kathryn Gustafson en mémoire de Diana.